Ci-dessous quelques textes. Certains de ceux-cis, confrontés à des compositions de ma part, sont devenus des chansons, tandis que d’autres restent à l’état de prose ou de poème.
J’aime dans mes recherches artistiques mobiliser les contrastes, la résonance de mes sensations confrontées au monde et aux éclats des rencontres.
Ce que je vois
Ce que je sens
Se dépose.
Sédiments calcinés
Décomposés
Puits sombre et dense
D’où j’extraie
L’or noir de mes pensées
(Le temps joue en ma faveur)
Et un peu de cette brume qui camouflait la nuit
Mes doigts encore humides de leurs caresses aux algues
Et mon corps aride
A nouveau passer la dune à nouveau
Traverser les silences
Et derrière les touffes sèches dont le vent plein d’écume
Et les phares d’une voiture faisaient danser les ombres
L’odeur du réservoir
Et mes pieds sur l’asphalte.
Là-bas dans l’ombre rose
Qui tâchait l’horizon
Dormait la multitude
Mes Frères, Sœurs et Amours
Dont je ne savais que faire.
Entouré d’habitudes
Je m’assis sur la route
Dont j’aimais effleurer la rugosité.
Cette route.
D’un soulèvement soudain, je me voyais partir
Parcourir toute la nuit ce vaste réseau d’étoiles
D’Oléron jusqu’à Sakhaline
Et m’arrêter au matin
A l’aube d’une autre ville
D’une autre mer
D’un autre ciel
D’un autre vent
Devant d’autres assoiffés d’ailleurs
Indomptable écume
Houleuse vogueuse
Ecume
Et mon oeil qui se perd
Tu danses je présume
Aphrodite des mers
Dans ces embruns dont j’hume
L’affre de tes mystères
De quoi es-tu faite écume ?
Pour qui, pour quelle fête
Pares-tu donc les têtes
De ces vagues amères ?
Et quand moi je souhaite
Suivre tes amourettes
D’air et d’eau et de lune
J’enclume
Dans l’hostile et austère
Noirceur des fonds marins
Où noyeurs de chagrins
Vieux morses, jeunes requins
Belugas, poissons-lunes
Fument
Des pipes d’écume
La tasse nous bûment
Dans des cornes de brume
Les roches effritées
M’accueillent comme un oreiller
Sur mon talon s’enroule un lierre
Désireux de m’envelopper
Je le regarde lentement grimper
Autour de mes chevilles
Le long de mes mollets
Bientôt me voilà tout entier
Enlacé
Et je vacille
Une amie me prend par la main
C’est l’épine
D’une branche brisée
Un arbuste orphelin
Une plante marine
Qui chercha à m’aider
Elle me raconte
Sa solitude
Mais pour qui s’époumone cet oiseau blanc ?
N’a t-il jamais vu un corps mourant ?
Laisse moi dormir encore un peu
Et m’imprégner
De chlorophylle
Le lierre s’abreuve d’eau salée
A mes yeux, à mes lèvres
Il plonge ses racines
La chaleur coule dans ma sève
Le soleil est ma médecine
La falaise m’accueille à ses pieds
Elle me retient en bas
De sa paroi fragile
Faisant semblant de m’oublier
Glissent autour de moi
Des reptiles
Mais pour qui s’époumone cet oiseau blanc ?
N’a t-il donc jamais vu un corps mourant ?
Laisse moi dormir encore un peu
Et m’imprégner
De chlorophylle
Ici la mer s’est retirée
On dirait qu’elle a fuit mes racines
Mon lierre continue de grimper
Et mes rochers toujours se ravinent
Que suis-je ? Qu’étais-je ? Que serais-je ?
Cela m’est bien égal
Je pourrais toujours être utile
Et je pense, plaisir immense intense et puéril
Que personne ne reconnaîtra jamais
Personne
Mon fossile
Mais pour qui s’époumone cet oiseau blanc ?
N’a t-il jamais vu un corps mourant ?
Laisse moi dormir encore un peu
Et m’imprégner
De chlorophylle
Éclats de voix, éclats de verre, éclats de rires
Et puis la route et puis la nuit
Il ne suffit pas d’écouter
Par chez toi quand les trains passent
Et font vibrer les toits de tôles
Il faut sentir l’odeur de peur
Et de colère et de sueur
Voisin je le vois
De ma petite et mince vitre
Ton doigt tendu
Ton cri ténu
Et je vois bien comme tu t’étouffe
Car malgré-toi tu es en guerre
Et tu sais
Ce que signifie perdre
Mon ami
J’ai compté toutes les marches
Qui mènent à toi
Je n’irai pas
Si la poussière est ta maison
Et si tes murs sont de carton
Ils ont de beau
Tout ce pourquoi ils m’indisposent
Bruts, violents et insolents
Crachats de rue et d’injustices
Au nom de la grande habitude
Tu es comme le coquelicot
Qui grandit dans la faille
D’un trottoir où les chiens pissent
Et où un pas, seul te foulera
Et te fera disparaître
Le pas d’un homme qui rêve sans doute
De grands espaces et de prairies
Le pas d’un homme qui rêve sans doute
De grands espaces et de prairies
Et qui chante
Comme est sérieuse ma légèreté
Si un jour j’apprends à parler
Ce sera pour prier : Mon Dieu
Comme est sérieuse ma légèreté
Si un jour j’apprends à parler
Ce sera pour crier : Mon Dieu
Donnez-leurs aujourd’hui notre pain de ce jour
Toi ou bien l’un de tes confrères
Qui prônent le partage et l’amour
Ou bien quelqu’un que ça réjouit
De décider pour quelques autres
Décidez pour moi je vous prie
J’essaierai d’être votre apôtre
Créez des fois, créez des lois
Faites les choix à ma place
Car je sais bien comment ça se passe
Au nom de la grande habitude
Celle de mon ingratitude
Celle qui dément mes certitudes
Celle qui conduit mon attitude
Car je veux avoir chaud
Car je veux bien manger
Je veux boire de l’eau
Des habits sur ma peau
Et un toit sur ma tête
Être un peu protégé
Quand je suis sous la couette
Avoir quelques amis
Ne pas manquer bien sur
Ni d’argent ni d’amour
Je veux être bien vu
Être un peu reconnu
Et un peu voyager
Pour me faire une idée
De combien de bonheurs
Combien de misérables
Il est possible d’entasser
Dans une cabane de tôle
Parfois je me sens souverain
Je suis le roi malgré moi
Qui habillé
Qui maquillé
Qui maculé
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Et je ne sais pas quoi faire
Ni quoi dire ni quoi penser
Des mots, des mots, des mots
Des mots démodés
Des mots doux
Des mots durs
Des mots d’ordres
Dont je me démets
Par démence ou dédain
Et toi, n’es tu pas jaloux
Quand tu vois qu’un missile
Atteindra sans un doute
Sans peurs et sans remords
Le but
De sa misérable vie?
Et qui oserait te dire que tu as tort ?
Que tout ce que tu sens
Tu ne devrais pas le sentir ?
Peut-on punir l’absence d’héroïsme?
Alors moi, par amour, je prends le métro
Par amour je plonge dans les foules
Par amour je m’inonde de lumière crue
Et je deviens multiple
Et je deviens les autres
J’infuse les trottoirs
Je bégaie je clignote
Je clignote au passage
Il court dans mon regard
Passant du vert au rouge
Une brève inquiétude
Ça y est j’ai de la fièvre
Et je sens sur mon front
Un peu du gras de cette ville
Il y a dans mes cheveux
Un peu du gras de cette ville
Et il y a sur mes mains
Un peu du gras de cette ville
Et on trouve dans mes oreilles
Un peu du gras de cette ville
Car les murs les plus blancs
Restent toujours couverts
D’une pellicule de suif
Je vois en moi la cité qui gronde
Ma ville ce sont mes intestins
Mes boyaux, mes artères
Les couloirs de mes opinions
Les dédales de mes pensées
C’est mon cœur qui palpite
De jour comme de nuit
Mes insomnies sont celles
Électriques
Qui abreuvent mes yeux
Et qui me tétanisent
De peur de m’en sortir
Et tout mon corps recèle
Au dedans comme dehors
En cet instant présent
De toutes les rancœurs
De tous mes frères et sœurs
Dans mon foie dans ma rate et dans mes reins
Dans mes manières de faire et de parler d’amour
Je croyais être au pouvoir
Mais c’était sans compter
Tous ceux qui m’habitent
Et tous ceux qui m’ont fait
Et tout ce que je bouffe
Et tous ceux qui m’incitent
Par leurs caresses adroites à me courber le dos
Rien ne s’arrête, rien, jamais
Qu’y a t-il au dehors ? Qui saurait me guider ?
Mais il n’y a personne.
Que mon imaginaire
Qui rêve d’absolu
Et ces bouchons de merde qui n’en finissent pas
Vision périphérique
Congestionnée, constipée
Je retiens
Je me retiens
Je retiens
Je me retiens
Je ne retiens que ça de ma vie de malade
Mes humeurs
Qui tantôt bouchonnent et tantôt éclatent
Dans un excès de zèle
J’essaie le yoga, le shiatsu, le tantrisme
Et des philosophies venues du bout du monde
Je mange bio
Mais ma boulimie me rends aveugle
Qui dort à côté de moi ?
C’est mon voisin l’allemand, le roumain, le ricain,
Le bronzé, le bridé, le frisé
Qu’il ne s’avise pas de tirer trop la couverture
Seul mon chien mon chat et mon canari
Peuvent se poser sur mon lit !
Non mais je rêve !
Non, mais je rêve
Non
Mais je rêve
Que je suis comme le coquelicot
Qui grandit dans la faille
D’un trottoir où les chiens pissent
Et où un pas, seul me foulera
Et me fera disparaître
Le pas d’un homme qui rêve sans doute
De grands espaces et de prairies
Le pas d’un homme qui rêve sans doute
De grands espaces et de prairies
Je suis l’arbre qui se veut vent
On m’appelle au-dehors
Mais ce n’est que mon souffle
Étouffé
Qui murmure
Ailleurs, Au-delà, Là-bas, Encore
Et d’autres fadaises au parfum de bout du monde
Salive amère
Creux du départ
Je caresse mes rêves
Humides
Comme un tas de cendres
Hors des sentiers battus
Poussez
Un peu loin
Poussez
Un peu trop loin peut-être
Mais là,
Prenez racine
Faites-vous gingembre, topinambour ou chicorée
Faites-vous des fleurs
Ça portera ses fruits
Mûrissez
Laissez vous cueillir, recueillir
Prenez-en de la graine
Faites-vous rhizome, cactus ou herbe folle
Devenez hêtre
Mais surtout
Mais avant tout
Plantez-vous
Hors des sentiers battus
Et plantez-vous bien
Appris par cœur
Sont mon décor
Encore
Toujours trop court
Le beau moqueur
Les jours d’accord
En chœur
Sans ton secours
D’amères liqueurs
Parcourent mon corps
Chaque heure
A court de cœur
L’amour n’accoure
Jamais vainqueur
D’accord
Dans ma rancœur
Ma dame de cœur
Refaire ta cour
M’écœure
Mais
Nos corps à corps
Appris par cœur
Sont mon décor
Encore
L’un de mes dix doigts s’est noyé
Tant attiré par les embruns
Le flux et reflux des marées
La douce bise et les courants
L’un de mes doigts s’est naufragé
Aurait-il donc touché le fond
De tes noirs pensers les rochers
Écueils déposés sur le sable
Fin des aventures passées
Il gratte et il cherche un trésor
Des cartes non répertoriées
Mais il ne trouve que silence
Il suffoque et doit remonter
A fleur de ciel du fond des mers
Pour ne jamais plus se baigner
Entre tes ondes capillaires
Un tout petit village
Hameau de peu de gens
A peine quelques familles
Qui m’ont toutes vu grandir
Ses maisons sont en ruine
Seuls quelques pans de murs
Parsemés ci et là
Me rappellent les rues
Me rappellent les gens
C’est en plongeant sous l’eau
Au profond de mon lac
Que je l’ai découvert
La vase et les poissons
En ont pris possession
Et les noms sur les portes
Se sont tous effacés
Aujourd’hui c’est l’hiver
Un miroir de silence
Recouvre mon village
Autant tout oublier
Car rien n’est plus certain
Qu’un silence de neige
Recouvrira nos peurs
Nos amours et nos peines
Nos hontes nos souvenirs
Les corps de nos parents
Et ceux de nos enfants
Nos frères et nos sœurs
Comme ce lac gelé
Dans mes os troubles
Une fois je t’ai vu frémir
Sur la grève de mes sourires.
Ce jour où tu vît se tarir
Goutte à goutte s’évanouir
La source de mes désirs.
Petit galet de mon souvenir
Je me noyais à discourir
De choses vagues et de ouïes-dire.
Tu me disais « Voyons respire ! »
Je ne voulais pas te mentir
Comment aurais-je pu mieux agir ?
Petit galet de mon souvenir
J’ai souvent voulu revenir
A ta rivière me recueillir
Mais il a trop plu pour franchir
Ce gué qui s’est fait recouvrir
Le courant porte à l’avenir.
Petit galet de mon souvenir
J’aimais contre toi me blottir
Nager dans tes yeux de saphir
Tu ricochais sur mes soupirs
Et tu éclatais d’un grand rire
Comme l’eau que l’on voyais jaillir.
Petit galet de mon souvenir
Tu es en moi tel un menhir
Comment as-tu pu tant grandir ?
Et vient s’échouer mon navire
Sur les récifs de mon délire
Petit galet comme je chavire.
Petit galet de mon souvenir
Je te lance et je te retire
De la grève de mes sourires.
Et c’est toi-même que je mire
Et la rivière de t’engloutir
Trois petits ronds qui vont faiblir